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démocratique pour l'ensemble de l'Empire que l'obtention de droits culturels et
nationalitaires pour tous les musulmans habitant la Russie.
Deux tendances nettement distinctes se manifestèrent dans ce mouvement:
autant la génération aînée, de formation universitaire, issue des milieux de vieille
noblesse marchait la main dans la main avec les libéraux russes, autant la jeune
génération, éduquée en grande partie dans les idées nationales, avait des
sympathies pour le radicalisme et les idées révolutionnaires.
La totalité des peuples musulmans, subissant uniformément le joug de
l'Empire russe, la politique antimusulmane de l'Empire étant bien connue, tendaient
vers un même but, unissant leurs efforts et liant leur travail d'organisation et de
propagande par les idées. Ainsi un rôle prépondérant de direction échut aux guides
de l'opinion publique azerbey-djanienne. Deux faits saillants marquent le
développement de leur vie politique propre: le premier est le congrès de Nijnij-
Novgorod en 1905, le second le congrès de Moscou en 1917. Ces deux congrès
fixèrent la forme politique des revendications des musulmans de Russie.
Le congrès de N. Novgorod, quoiqu'il eut proclamé le principe de la
collaboration tactique avec le libéralisme russe, se borna à des revendications
culturelles et de droits politiques. Par contre, le congrès de Moscou vota une
résolution exigeant l'abolition de l'unité de l'Empire au profit de l'autonomie de ses
parties composantes — les territoires nationaux. Aux deux congrès se furent les
représentants de l'Azerbeydjan qui donnèrent leur forme politique à ces
revendications. A N. Novgorod leur auteur fut le président de la fraction
musulmane de la première Douma d'Empire, A.-M. b. Topchibachi; à Moscou ce
fut le président du parti national-démocratique de l'Azerbeydjan "Moussavat",
M.E. Rassoul-zadé. A l'époque du congrès de N. Novgorod la majorité était pour
les libéraux, non seulement parmi les délégués au congrès mais aussi dans le pays,
en Azerbeydjan. Par contre au congrès de Moscou on ne s'aperçut même pas de
l'existence des libéraux, car la divergence d'opinions se trouvait être maintenant
entre les partisans de la coalition avec ce qu'il est convenu d'appeler la démocratie
révolutionnaire (leur desideratum d'une Russie démocratique, mais unitaire fut
d'ailleurs mis en minorité) et les nationalistes révolutionnaires, la grande majorité,
qui réclamaient la séparation complète de toutes les nations et territoires englobés
dans l'Empire russe. Ce nationalisme révolutionnaire azerbeydjanien, qui eut le rôle
décisif au cours du congrès de Moscou, trouvait son expression dans le parti
"Moussavat", lequel avait rendu public au cours d'un congrès précédent, le Congrès
des Musulmans du Caucase, tenu à Bakou en avril 1917, son programme exigeant
la formation d'États nationaux en Azerbeydjan, mais aussi des autres peuples turcs,
soumis à la Russie. Les dirigeants du parti Moussavat venaient de ces milieux de la
jeune génération, laquelle lors de la première Révolution avait déjà, à l'opposé de